Comment bien apprendre les gammes pentatoniques ?

Cet article a pour but délibéré de transformer votre manière d’apprendre. Il s’agit réellement de reprogrammer votre approche des gammes pentatoniques…Et plus généralement votre approche de la guitare !
En substance, le propos est de vous convaincre d’arrêter d’apprendre des positions par cœur à l’aveugle. Vous croyez gagner du temps en faisant l’impasse sur un travail de fond qui vous semble énorme mais en réalité, vous perdez énormément de temps et surtout vous passez à côté de l’essentiel !
L’alternative, c’est de comprendre comment sont construites les gammes pentatoniques et de travailler des exercices qui vont vous les faire rentrer dans les doigts et l’oreille. C’est de surcroit une excellente porte d’entrée vers l’apprentissage de toutes les autres gammes.
Et si vous vous mettiez à appliquer un système plus intelligent pour apprendre ? Où en seriez-vous dans trois mois ? un an ?
Si vous êtes un guitariste curieux et motivé, la lecture en vaut le détour.
Bonne lecture !
Chapitre 1 : Comment perds-t-on des années à mal apprendre les gammes pentatoniques
Quand on dépasse le stade de débutant en guitare électrique, on en vient vite à vouloir improviser avec ses potes ou par-dessus un titre, souvent dans des styles blues et rock au sens large. C’est à ce moment qu’on décide d’apprendre les fameuses gammes pentatoniques.
Généralement, ça se passe à peu prêt comme ça. Vous prenez une vidéo YouTube ou un pote vous apprends la position suivante :
Ensuite, vous allez sur internet et vous trouvez les autres positions sur le manche, ce qui donne généralement quelque chose comme ça :
En tous cas, c’est ce qui s’est passé pour moi et mes amis quand on était au lycée, et c’est avec ce bagage là que viennent me voir mes élèves pour bosser sur l’improvisation.
Ensuite vous apprenez des plans, vous connaissez les cinq positions par cœur et vous pouvez parfois vous la péter avec des plans de tueur sur un accord de La.
Enfin, vous « comprenez » que la pentatonique majeure c’est quasiment pareil que la pentatonique mineure mais décalée trois cases plus bas…Mais au fond vous ne voyez pas trop pourquoi et puisque ça sonne vachement bien en mineur pourquoi s’embêter à jouer de la pentatonique majeure :).
Sauf qu’après une première période d’euphorie où vous progressez pas mal en technique, vous vous rendez compte que vous stagnez.
- Improviser sur les changements d’accords vous posent problème
- Vous restez souvent sur les mêmes positions
- Vous commencez à ressasser les mêmes plans
Et c’est tout à fait normal !
Tout votre travail jusqu’à maintenant n’a été que de répéter les phrases d’une langue que vous ne comprenez pas.
Je suis dur mais pas de quoi se flageller non plus. La guitare est un loisir, vous avez pris plaisir jusque là, et si vous lisez cet article, c’est j’espère que vous êtes prêt à faire un nouveau pas !
Vous avez utilisé jusqu’à présent ce que j’appelle des positions aveugles de gamme. Cela vous a aidé un temps mais vous bloque à long terme.
Je vais maintenant vous expliquer une méthode beaucoup plus efficace pour aborder les gammes pentatoniques et bien plus.
Chapitre 2 : Reprogrammer son apprentissage des gammes
Sans plus de suspens, je vous dévoile le secret direct de but en blanc.
Les gammes sont comme des organismes vivants. Les intervalles sont leurs atomes. Leurs squelette sont les triades, et leurs intervalles caractéristiques sont leur identité.
Vous pouvez aussi voir ça comme une maison. Le matériau est constitué d’intervalles. Les triades sont les fondations. Les intervalles caractéristiques sont les formes spécifiques de la maison.
Imaginez qu’en tant qu’architecte vous connaissiez sur le bout des doigts le matériau utilisé pour toutes les maisons, et comment construire la structure ? Il ne vous resterait plus qu’à vous adapter en fonctions des caractéristiques uniques qu’on vous demande pour construire de nouvelles maisons.
Et bien l’idée pour apprendre n’importe quelle gamme, c’est ça. Bien connaitre les intervalles et les triades, et rajouter par dessus les notes caractéristiques à chaque gamme.
Si rien de tout cela ne fait sens pour l’instant, accrochez-vous, on va reconstruire les pentatoniques ensemble maintenant.
Le squelette des gammes pentatoniques – les triades
Les triades sont les formes les plus simples d’accords. Ce sont des accords à trois sons qui comptent :
- Une fondamentale
- Une tierce (mineure ou majeure)
- une quinte juste
Pour rappel,
- une tierce mineure est située à 1.5 tons au-dessus de sa fondamentale. Trois cases de guitare la séparent de sa fondamentale (une case vaut un demi-ton).
- Une tierce majeure est située à 2 tons au-dessus de sa fondamentale, donc quatre cases la sépare de sa fondamentale.
- Une quinte juste est située à 3.5 tons au-dessus de sa fondamentale.
A ce stade, il vous est primordial de commencer à apprendre vos notes sur le manche si ce n’est déjà fait.
Tous les accords de base que vous avez appris sont construits à partir des triades.
Voici ci-dessous l’ensemble des triades majeures de La majeur. Le R rouge est le mot anglais Root qui veut dire fondamentale.
En ce qui concerne les pentatoniques mineures, c’est quasiment la même chose sauf que la tierce est abaissée d’un demi-ton, ce qui donne :
L’identité de la gamme pentatonique majeure.
Une fois que vous avez les triades majeures dans une tonalité (ici en La), il ne vous manque plus que deux notes pour avoir votre pentatonique majeure.
Et oui, dans triades, il y a TROIS, et dans pentatonique il y a PENTA veut dire CINQ en Grec.
Sans plus attendre, les deux notes qui font l’ADN de la pentatonique majeure sont :
- une seconde majeure
- une sixte majeure
Une seconde majeure est située à un ton au-dessus de sa fondamentale, soit séparée de deux cases.
Une sixte majeure est située un ton au-dessus de la quinte juste, soit séparée de deux cases.
En visuel, ça donne ça :
L’identité de la gamme pentatonique mineure.
Pour la gamme pentatonique mineure, les deux notes caractéristiques sont différentes. Il s’agit :
- D’une quarte juste
- D’une septième mineure
La quarte juste est située un ton en dessous de la quinte soit séparée de deux cases.
La septième mineure est située un ton en dessous de l’octave soit séparée de deux cases.
Ce qui nous donne :
Le tour est joué, nous avons reconstruit nos deux gammes pentatoniques. Désormais ce ne sont plus des positions aveugles que vous avez sous les yeux mais une vrai carte routière qui vous indique le parcours.
Et alors ? Ça vous fait une belle jambe ?
Et oui, à ce stade, je vous ai tout déballé sans ménagement. Peut-être ne voyez vous pas encore à quel point il est utile et plus facile de voir les choses ainsi.
Laissez-moi avancer quelques arguments.
- En développant votre reconnaissance visuelle et sonore des intervalles, vous allez vite repérer lesquelles vous aimez voir sonner sur tel ou tel accord
- De même, vous saurez mieux aborder les changements d’accord en sachant quelles notes cibler et en vous préparant à l’avance grâce à votre connaissance du manche
- Une fois que vous maitriser les triades, il ne vous manque à chaque fois que deux ou trois notes pour construire n’importe quelle gamme. Par exemple, le mode de La Ionien (gamme majeure) comprends toutes les notes de la pentatonique majeure plus une quarte juste et une septième majeure.
J’ouvre juste la porte. Vous pouvez tester toutes sortes de pentatoniques à partir de ce matériel. Un cours exhaustif sur les pentatoniques hybrides prendrait 50 pages et ne servirait à rien.
C’est comme pour les bouquins d’accords. C’est complètement inutile. Apprenez à les construire et à les retrouver. Ne les apprenez pas par cœur !
La méthode est plus forte que la mémoire.
Je vous ai donné ici beaucoup d’informations brutes. Dans le dernier chapitre, je vais vous donner les clés pour intégrer cette masse d’informations dans votre jeu.
Chapitre 3 : Pratiquer les gammes pentatoniques
Il faut distinguer ici deux choses :
- Le travail de fond
- Le travail de plans et de solos
Le travail de fond
Le travail de fond est le travail qui vous permet d’intégrer de nouvelles gammes dans le corps et le cerveau. C’est souvent un travail rébarbatif que peu de personnes sont prêtes à faire bien qu’il fasse la différence à l’arrivée.
Concrètement il s’agit de faire rentrer dans le cerveau la position et la qualité sonore de chaque intervalle joué.
Je vous conseille pour cela les exercices suivants.
Exercice 1 :
Jouer les triades majeures et mineures sur une seule corde.
- En partant de la fondamentale, puis de la tierce, puis de la quinte.
- En montant et en descendant
- En disant/chantant les intervalles
- En disant/chantant les notes
Exercice 2 :
Faites la même chose en rajoutant les intervalles caractéristiques de la gamme.
Exercice 3 :
Faites le même travail sur une position du manche.
Exercice 4 :
Faites le même travail en passant d’une position à une autre jusqu’à vous balader sur tout le manche.
Comment intégrer ces exercices à votre programme ?
On va pas se le cacher, ces exercices sont ennuyeux au premier abord et pourtant ils requièrent beaucoup de concentration.
C’est grâce à eux que vous allez savoir en permanence où jouer juste sur votre instrument.
Il faut les faire dans un état second, quasiment méditatif. Faites les concentrés, à fond, et essayez d’être très présent. Plus vous serez présents, plus vite vous allez les intégrer. Se débarrasser de ces exercices devant la télé ne vous servira à rien.
Le mieux, c’est de prendre 5 minutes en début de chaque session de jeu pour s’échauffer dessus avant de passer à des exercices plus plaisants ensuite.
Travailler par-dessus un backing track peut également rendre l’exercice beaucoup plus agréable. Si vous vous abonnez à ma newsletter, sachez que j’envoie de temps en temps des backing tracks pour travailler l’impro.
Abonne-toi à ma newsletter et reçois de temps en temps, entre autre, des backings tracks pour progresser.
Et surtout, la règle d’or : un petit peu chaque jour vaut beaucoup mieux que une heure toutes les deux semaines.
C’est neurologique. Votre cerveau intègre bien plus des actions répétées chaque jour, même très peu, plutôt que des actions réalisées ponctuellement, même intensément.
Si vous pensez qu’il vous faut huit heures par jour pour devenir excellent en guitare, j’ai une bonne nouvelle, vous vous trompez. En travaillant intelligemment, vous pourrez égaler et dépasser des guitaristes moins méthodiques qui travaillent plus d’heures que vous.
Le secret, je me répète, c’est donc de travailler intensément, en conscience, sur une courte période de temps, mais TOUS LES JOURS (ou presque).
Si ces sujets d’efficacité et d’optimisation vous intéresse, je vous recommande les lectures suivantes de Timothée Ferriss :
- The Four Hour Week
Le travail de plans et de solos
Grâce à ce travail de fond, vous allez aborder votre apprentissage de plans et de solos d’une manière bien plus saine.
Au lieu de reconnaitre à peu prêt des positions aveugles de pentatonique, vous saurez précisément quels intervalles et quelles notes votre guitar hero préféré a utilisé par dessus tel ou tel accord.
Apprenez alors un maximum de plans ! Récupérez des partitions, apprenez les passages qui vous plaisent, et surtout, transcrivez !
Si vous êtes dans une période où vous travaillez l’improvisation, je vous propose le plan de travail suivant pour 30 minutes par jour :
- cinq à dix minutes de travail de fond
- Dix minutes de travail de plans et de solos en pentatoniques
- Dix minutes d’improvisation et/ou de construction de votre propre solo sur un backing track.
Conclusion
En définitive, les pentatoniques, c’est tout simplement des triades majeures ou mineures auxquelles on a rajouté deux notes :
- une seconde majeure et une sixte majeure pour la pentatonique majeure
- une quarte juste et une septième mineure pour la pentatonique mineure
La dose de théorie nécessaire pour comprendre ça n’est pas énorme. Vous devez être au point :
- sur les intervalles
- la position des notes sur le manche (quoique cette approche va vous les faire travailler si vous partez de zéro)
Apprendre les gammes pentatoniques en partant de la triade, c’est donc :
- comprendre en profondeur la relation entre l’accord joué et la gamme
- développer son oreille en reconnaissant la couleur sonore des intervalles
- développer sa connaissance du manche
- s’ouvrir des portes pour apprendre n’importe quelle gamme rapidement
J’espère vous avoir ouvert des horizons et surtout vous avoir convaincu de modifier votre méthode d’apprentissage.
Je serais curieux d’avoir vos retours si vous vous mettez en tête d’appliquer ce programme pendant trois mois.
Aussi, comme je n’ai pas la science ultime de l’apprentissage des gammes pentatoniques, n’hésitez pas à partager ici vos propres méthodes. Je suis très curieux !
A très bientôt pour un nouvel article pédagogique ou une nouvelle transcription commentée !
Salut !